Peu de provinces canadiennes investissent dans les incitatifs à la consommation de véhicules électriques. Il est temps qua ça change.
La bonne nouvelle : le nombre de véhicules zéro émission (VZE) au Canada a augmenté de 58 % en 2021, selon un récent rapport Automotive Insights d’IHS Markit.
La mauvaise nouvelle : les VZE ne représentent encore que 1 véhicule neuf vendu sur 20 au Canada (5,6 %) en 2021, selon le même rapport.
Transports Canada utilise le terme VZE pour décrire les véhicules qui peuvent circuler sans produire d’émissions polluantes. Les VZE comprennent donc les véhicules électriques à batterie (BEV), hybrides rechargeables (PHEV) et à pile à combustible à hydrogène (FCEV).
Le gouvernement canadien s’est engagé à atteindre 100 % des ventes de VZE d’ici 2035, ce qui n’est pas différent des objectifs ambitieux fixés par les États-Unis, le Royaume-Uni et l’Allemagne. Convaincre les 19 autres acheteurs canadiens de véhicules neufs sur 20 de se défaire de la routine et du confort d’un véhicule à combustion semble un défi de taille puisque la date d’échéance n’est que dans 13 ans.
Il y a toutefois des signes positifs.
L’année 2022 marquera l’introduction de nouveaux modèles de VZE dans les segments qui touchent le plus les Canadiens, soit les utilitaires, les multisegments et les camionnettes, ainsi que du côté des fabricants et des concessions locales qu’ils connaissent et en qui ils ont confiance.
« L’époque des caractéristiques discrètes et immuables des véhicules par année modèle n’existe pas dans le monde des VZE. »
Les soi-disant constructeurs traditionnels comme Ford (Mustang Mach-e), Hyundai (Ioniq 5), Kia (EV6), Nissan (Ariya), Volkswagen (ID.4) et Porsche (Taycan) ont déjà lancé des modèles VZE acclamés par les médias et les consommateurs. Offrir des choix significatifs aux consommateurs « au-delà de Tesla » est essentiel à l’adoption des VZE. Même Elon Musk est d’accord avec cette affirmation.
Nous voyons également des signes prometteurs que les constructeurs adoptent des pratiques de développement de produits logiciels similaires à celles de Tesla. L’époque des caractéristiques discrètes et immuables des véhicules par année modèle n’existe pas dans le monde des VZE.
L’annonce récente de Ford à l’effet que la société sépare les activités liées aux véhicules à combustion traditionnelle (Ford Blue) et les activités liées aux véhicules électriques (Ford Model e) en deux divisions distinctes est emblématique de la nécessité d’apporter une innovation continue aux consommateurs en temps réel. Lorsque les Canadiens se rendront compte que certains aspects de leur véhicule s’améliorent avec le temps, l’adoption des VZE s’accélérera.
Mais des défis importants demeurent, notamment :
- Faible connaissance des consommateurs et faible engagement – Les données récentes du Clarify’s State of Charge EV Monitor confirment que l’engagement numérique des Canadiens sur le sujet des véhicules électriques ne représente qu’une fraction (un tiers) du niveau d’engagement global sur le sujet de l’automobile.
- Anxiété liée à l’autonomie – Étant donné que de nombreux VEB offrent maintenant une autonomie de 400 kilomètres ou plus sur une seule charge, l’anxiété liée à l’autonomie peut être plus imaginaire que réelle, mais cette perception empêche néanmoins certains Canadiens d’envisager sérieusement l’option des VZE.
- Infrastructure de recharge – Pour être plus précis, le manque d’options de recharge publiques visibles (à l’exception peut-être du réseau de suralimentation de Tesla) et la faible fiabilité des stations de recharge actuellement installées.
- Une question de prix – Selon le State of Charge EV Monitor de Clarify, près de 60 % des ménages canadiens ont un revenu annuel inférieur à 100 000 $. Jusqu’à ce que les VZE soient facilement offerts à un prix inférieur à 40 000 $ (neufs et d’occasion), l’engagement et l’adoption pour la plupart des Canadiens resteront faibles.
- Un autre défi important pour atteindre l’objectif de ventes de VZE de 2035 est que 80 % des provinces ne sont pas dans le jeu des VZE. En fait, 71 % de tous les VZE vendus au Canada l’an dernier se trouvaient en Colombie-Britannique et au Québec. C’est un aussi bon exemple de la règle 80/20 que vous êtes susceptible de trouver.
La situation de l’Ontario est particulièrement préoccupante. La plus grande province du Canada compte pour près de 40 % des ventes totales de véhicules neufs chaque année. Pourtant, en 2021, seulement 3,3 % des 664 000 livraisons de véhicules neufs en Ontario étaient des VZE par comparaison avec 5,6 % à l’échelle nationale, 9,5 % au Québec et 13 % en Colombie-Britannique. Avec une population essentiellement urbaine et suburbaine et avec 91 % du réseau électrique provenant de sources non émettrices de carbone (Rapport 2017 de l’Organisme canadien de réglementation de l’énergie), l’Ontario a le potentiel de représenter un marché de VZE fort.
Mais, alors que le gouvernement de l’Ontario cherche activement à investir dans l’approvisionnement en VZE (matières premières, recherche et développement, composants et fabrication), elle a jusqu’à présent résisté à faire des investissements du côté de la demande. Les solides programmes de rabais aux consommateurs en Colombie-Britannique et au Québec sont l’une des principales raisons de leur leadership en matière de VZE.
L’ampleur du « défi de l’Ontario » est très claire quand on compare le rendement des VZE provinciaux sous la forme d’un indice de pénétration des VZE. Avec un indice estimé à seulement 58, l’Ontario se situe bien en dessous de sa catégorie des poids super lourds. En termes relatifs, avec un indice estimé à 235, le poids moyen de la Colombie-Britannique surpasse l’Ontario par un facteur quatre.
« L’année 2022 marquera l’introduction de nouveaux modèles de VZE dans les segments qui touchent le plus les Canadiens, soit les utilitaires, les multisegments et les camionnettes. »
Bien que la situation des ventes de VZE dans les sept autres provinces (reste du Canada) soit encore pire avec un indice de pénétration estimé à seulement 25, la réalité est que le Canada ne peut espérer atteindre son objectif de 2035 sans une approche sensiblement différente en Ontario.
Bien que les rabais aux consommateurs ne soient pas la seule réponse, ils constituent un moyen-clé de combler temporairement l’écart de prix jusqu’à ce que les VZE atteignent la parité de coût de possession avec les véhicules à moteur thermique et jusqu’à ce que les consommateurs aient plus de choix de VZE dans des segments abordables et à forte demande comme les utilitaires.
De solides programmes de rabais aux consommateurs en Colombie-Britannique et au Québec ont accéléré la transition vers les VZE des « adopteurs précoces » aux acheteurs « majoritaires précoces ». Les provinces maritimes ont récemment mis en place des incitatifs de rabais. L’Ontario et les provinces des Prairies — la balle est dans votre camp.
Comme un mentor avisé aimait me le rappeler, l’espoir n’est pas une stratégie.
