Impact de la suspension des incitatifs sur les concessions québécoises

Un ralentissement marqué des ventes de véhicules électriques

La mise en pause du programme Roulez vert de février à mars 2025, combinée à la suspension du programme fédéral iZÉV, crée un climat d’incertitude pour les concessions du Québec. Depuis plusieurs années, les incitatifs ont facilité l’adoption des véhicules électriques (VÉ) ainsi qu’hybrides rechargeables (VHR) et réduit l’écart de prix avec les véhicules à essence. Leur disparition soudaine complique la transition et freine les ventes.

Selon Hassan, directeur général d’une concession Kia, l’impact est déjà tangible :

« En janvier, nous avons enregistré 15 annulations, soit un taux de 100 %. Tous ces véhicules étaient prêts à être livrés, mais le retrait des incitatifs a rendu les modèles abordables trop chers pour plusieurs ménages. Pour ce qui est des véhicules haut de gamme, les clients ont continué à les acheter, mais avec des rabais importants pour compenser la perte des incitatifs. En février, sans aucune aide, la demande s’est complètement effondrée. »

Le manque d’information et la confusion autour des incitatifs aggravent la situation. De nombreux consommateurs, qui pensent à tort que tous les rabais et les programmes des constructeurs sont abolis, retardent ainsi leur décision d’acheter. Cette incertitude pèse lourdement sur les concessions qui peinent à élaborer une stratégie de vente et de marketing efficace.

Les constructeurs qui ont misé sur les hybrides s’en sortent mieux

L’analyse du marché montre une corrélation entre la diversité des gammes électrifiées et la résilience financière. Les constructeurs qui ont intégré à la fois des VHR et des VÉ ont mieux navigué dans les fluctuations du marché ces dernières années. À l’inverse, ceux qui n’ont misé que sur des modèles 100 % électriques ont rencontré plus de difficultés, notamment en 2023 et en 2024.

Cette tendance s’explique par la souplesse qu’offre le VHR dans un contexte d’incertitude économique et de déploiement limité des infrastructures de recharge. Les clients hésitants face aux contraintes des véhicules 100 % électriques privilégient des options hybrides, ce qui garantit une transition plus progressive.

« L’inventaire accumulé représente un risque financier majeur si les modèles ne trouvent pas preneur rapidement. »

Des investissements coûteux qui pèsent sur la rentabilité

Les concessions qui ont embrassé l’électrification ont su préserver leur profitabilité après la chute des marges postpandémie. Cependant, cette adaptation a nécessité des investissements majeurs pour répondre aux nouvelles exigences du marché :

  • Formation des équipes sur les VÉ ;
  • Installation de bornes de recharge ;
  • Aménagement des salles d’exposition adaptées à l’électrique.

Malgré ces efforts, une question centrale demeure : comment gérer les stocks et le financement des véhicules si les ventes stagnent ? L’inventaire accumulé représente un risque financier majeur si les modèles ne trouvent pas preneur rapidement.

Une année 2025 incertaine : recul anticipé des ventes

Alors que la baisse des taux d’intérêt pourrait redonner un léger souffle au marché, elle ne suffira pas à compenser l’absence de subventions.

Selon Hassan, la situation sur le terrain varie selon les segments de marché :

« En février, les constructeurs ont commencé à offrir des incitatifs et des taux de financement réduits, ce qui aide un peu. Mais le vrai problème, c’est le manque de communication. Beaucoup de clients croient qu’il n’existe plus de programmes d’aide, ce qui freine les ventes. Cette incertitude nous pénalise encore plus que la fin des rabais eux-mêmes. »

Il prévoit une baisse à 25 % des ventes pour les modèles électriques en 2025 contre 34 % en 2025. Actuellement en février on est à 5 %, mais ces chiffres demeurent anecdotiques et ne sont pas représentatifs de l’ensemble du réseau. L’impact réel variera selon les marques, la localisation géographique et la capacité des concessions à s’adapter aux nouvelles conditions du marché.

Le secteur est pris dans une zone grise où ni les concessions ni les constructeurs ne savent quelle direction prendre. L’attente d’une nouvelle politique d’incitatifs ou d’un ajustement des prix rend difficile la mise en place d’une stratégie commerciale et de marketing claire.

Une transition sous pression

Le retrait des incitatifs bouleverse un marché qui s’appuyait sur ces aides pour accélérer l’adoption des VÉ. Les concessions doivent maintenant jongler avec des stocks coûteux, une demande volatile et une communication confuse auprès des consommateurs.

Les constructeurs qui ont diversifié leur gamme avec des hybrides rechargeables semblent mieux armés pour naviguer dans cette période. Toutefois, si l’incertitude persiste, et si l’inventaire ne se vend pas rapidement, la rentabilité des concessions pourrait être durement affectée en 2025. Il est essentiel que nos élus adoptent des politiques claires, pragmatiques et réalisables afin de permettre aux concessions de jouer pleinement leur rôle dans la transition vers une société carboneutre.

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