Les taux d’intérêt élevés et l’endettement croissant des consommateurs ont un impact sur les perspectives de réussite des concessionnaires.
Permettez-moi de commencer en disant que, en général, il nous faudra encore un an avant de connaître des changements importants à la hausse dans nos activités de vente au détail d’automobiles au Canada.
Il y a quelques mois, j’ai écrit un article intitulé « Rester en vie jusqu’en 2025 ». De nombreux facteurs doivent encore s’aligner, et je crois que 2024 sera la continuation de l’alignement amorcé à la fin de 2023. Il reste cependant encore un long chemin à parcourir.
Les ventes de véhicules neufs au Canada ont atteint un sommet en 2017. On a presque atteint ce sommet en 2018 lorsque les ventes de véhicules neufs ont dépassé les 2 millions de véhicules au cours des deux années. Selon le rapport de DesRosiers Automotive Consultants (DAC) du 3 janvier 2024, les ventes de véhicules neufs en 2023 ont augmenté de 11,8 % par comparaison avec l’année précédente pour atteindre 1,664 million de véhicules. Même avec une augmentation significative des ventes de véhicules neufs pour 2023, le marché n’a atteint que 80 % de son sommet de 2017.
Depuis 2018, beaucoup de choses ont changé. Les défis de l’industrie ont été bien documentés, et je vous en épargnerai la répétition. Je souhaite plutôt me concentrer sur quelques défis et quelques occasions d’affaires macroéconomiques ainsi que sur l’impact microéconomique des consommateurs et des concessions d’automobiles.
Selon la Banque mondiale, la macroéconomie se concentre sur la performance des économies — les changements dans la production économique, l’inflation, les taux d’intérêt et de change et la balance des paiements.
«Certaines marques offrent des rabais importants et des financements à faible taux d’intérêt dans le but de stimuler les ventes de véhicules neufs pour leur marque. »
La réduction de la pauvreté, l’équité sociale et la croissance durable ne sont possibles qu’avec des politiques monétaires et fiscales saines, alors que la microéconomie est basée sur des modèles de consommateurs ou d’entreprises (que les économistes appellent agents) qui prennent des décisions sur ce qu’il faut acheter, vendre ou produire — avec l’hypothèse selon laquelle ces décisions aboutissent à un équilibre parfait du marché (la demande est égale à l’offre) et à d’autres conditions idéales. Les deux sont liés.
Au cours de la période qui va de 2019 à 2023, les ventes annuelles de véhicules neufs au Canada ont considérablement diminué. À la fin de 2023, les immatriculations de véhicules neufs étaient encore 20 % inférieures au pic de 2017. On pourrait conclure que cet état de fait crée à lui seul un important carnet de ventes de véhicules neufs de plusieurs centaines de milliers d’exemplaires d’ici 2024.
De plus, au cours de la période de 2019 à 2023, la population du Canada est passée de 37,3 à 40,6 millions, soit une augmentation cumulative de 8,9 %.
C’est bien connu, dans l’ensemble, tous les Canadiens ont besoin d’un véhicule pour occuper un emploi. En 2019, 19,2 millions de personnes travaillaient au Canada. En octobre 2023, ce nombre était passé à 20,3 millions, soit une augmentation de 1,1 million de travailleurs.
Bien que les travailleurs choisissent d’acheter un véhicule neuf ou un véhicule d’occasion, l’augmentation de 1,1 million de travailleurs crée une demande pour les véhicules en général. Combinée à la morosité des ventes de véhicules neufs provoquée par la pandémie, la croissance démographique ainsi que l’augmentation du nombre de travailleurs sur le marché du travail nous donnent une raison réaliste d’être optimistes en 2024 et 2025.
Tout n’est pas rose, cependant. Les consommateurs sont confrontés à de fortes difficultés sur de nombreux fronts. Au cours des dernières semaines, la Banque du Canada et la Réserve fédérale américaine (fin de décembre) ont laissé entendre que la hausse des taux d’intérêt pourrait avoir atteint un sommet ou être sur le point de l’atteindre. Il y a donc une lueur d’espoir que les taux d’intérêt pourraient amorcer leur mouvement à la baisse en 2024.
La hausse des taux d’intérêt a eu un impact significatif sur l’endettement des consommateurs et des entreprises. Dans ce contexte, les versements mensuels d’un véhicule ont considérablement augmenté pour la plupart des ménages canadiens à la recherche d’un véhicule neuf.
Ajoutez à cela des versements hypothécaires élevés, et les Canadiens, pour la plupart, ressentent une pression financière importante. Le marché immobilier est en train de passer d’un marché de vendeurs d’il y a à peine un an à 18 mois à un marché d’acheteurs.
De plus, alors que la production de véhicules commence à s’accélérer, le marché de l’automobile commence à montrer des signes de faiblesse. Certaines marques offrent des rabais importants et des financements à faible taux d’intérêt dans le but de stimuler les ventes de véhicules neufs pour leur marque.
Le marché de l’automobile s’éloigne du marché « prenez-le ou quelqu’un d’autre le prendra » des deux dernières années. À mesure que les stocks de véhicules s’accumulent, les concessionnaires supportent d’importants intérêts sur les immobilisations et d’autres coûts de financement flottant. Les marges brutes sur les ventes de véhicules commencent à diminuer à mesure que les problèmes d’abordabilité des véhicules sont résolus. Cela exerce une pression à la baisse sur la rentabilité des concessions.
L’inflation a augmenté le budget des ménages et les coûts d’exploitation des entreprises, ce qui a amené chacun à se serrer la ceinture et à tenter de réduire les coûts.
Les consommateurs doivent prendre des décisions importantes en matière de dépenses : payer des versements hypothécaires plus élevés, des versements pour l’automobiles plus élevés, des versements plus élevés pour le carburant de leur maison et de leur véhicule, des versements d’assurance plus élevés et des coûts alimentaires plus élevés, etc.
Pour de nombreux Canadiens, les rentrées d’argent ne suffisent pas à faire face à leurs dépenses mensuelles. Selon l’Agence de la consommation en matière financière du Canada (ACFC), de plus en plus de Canadiens sont confrontés à des difficultés financières, leur taux ayant presque doublé en 2023 par rapport à août 2020.
De mon point de vue, 2024 sera encore une année difficile pour la plupart des ménages canadiens, même si certains ont augmenté leur rémunération.
Les consommateurs sont loin de se sentir à l’aise, et cela n’augure rien de bon pour les dépenses nécessaires et discrétionnaires.
Pour les concessions d’automobiles, les pressions inflationnistes sur les coûts d’exploitation se poursuivront, de même que la suppression de la marge brute, ce qui entraînera une pression à la baisse sur la rentabilité.
Les fabricants auront toujours besoin d’investissements supplémentaires de la part de leurs concessions, ce qui contribuera à augmenter globalement les coûts d’exploitation. Bon nombre de ces investissements touchent les véhicules électriques, alors que les fabricants tentent d’atteindre des objectifs environnementaux fédéraux et provinciaux agressifs.
Les défis des fabricants ici sont énormes, car de nombreux conducteurs vivent dans des logements résidentiels multi urbains comme des copropriétés et des immeubles d’habitation.
Les coûts de modernisation sont énormes et échappent au contrôle de l’industrie. Alors que l’industrie est confrontée à une course contre la montre, les pressions sur les consommateurs et les concessionnaires continueront d’augmenter. Avec 10 % des consommateurs qui contribuent à hauteur de plus de 30 % sur tous les kilomètres parcourus, l’acceptation des consommateurs est essentielle pour atteindre les résultats souhaités par le gouvernement. Il y a encore beaucoup de travail à faire ici.
À l’approche de 2024, il y a lieu d’être optimiste mais prudent.
Les concessions doivent cependant garder un oeil vigilant sur les problèmes macro et micro qui affectent leurs clients, leur communauté, leur marque et leur concession.
Nous sommes en train de passer d’une approche axée sur la vente de véhicules neufs à une plus grande dépendance à l’égard des opérations fixes et à une pénétration accrue des véhicules d’occasion dans un environnement de véhicules à moteurs thermique et électrique. Ce ne sera pas un mince défi.
