Les signes qu’envoie le marché sont contradictoires, et les concessionnaires doivent être aux aguets et tout surveiller.
Si l’on se souvient bien, le travail d’un concessionnaire était autrefois assez simple : il suffisait de déverrouiller les portes, et les clients entraient dans votre salle d’exposition ou se rendaient au service après-vente.
Puis on a connu une période de concurrence féroce au cours de laquelle de nouvelles marques et de nouvelles concessions ont fait leur apparition partout au Canada. Les programmes d’image étaient à la mode, et les concessionnaires ont investi des millions de dollars dans les installations et l’infrastructure technologique.
Bien qu’il y ait eu des changements du côté des marques, le nombre de concessions est resté relativement constant dans environ 3 500 points de vente au cours des vingt dernières années. Les concessionnaires continuent à investir massivement.
La relation commerciale entre les marques et les concessions a radicalement changé. Les marques sont beaucoup plus impliquées dans les activités de leurs concessions agréées.
Alors que la concurrence dans le secteur des véhicules continue de s’intensifier, les marques cherchent aujourd’hui à établir un lien direct avec les clients et, à ce titre, sont davantage impliquées dans la détermination de l’état des lieux au sein de leurs réseaux de concessions.
Le marché de la consommation est vaste et diversifié ; les marques souhaitent conquérir le plus d’activité possible auprès des consommateurs. Le positionnement concurrentiel des marques est primordial. Comme nous le savons tous, la part de marché totale recherchée par les constructeurs d’automobiles s’élève toujours à plus de 100 %, et les marques recherchent leur juste part du gâteau.
« Les années 2024 et 2025 s’annoncent comme des années difficiles pour le secteur de l’automobile. »
La valeur des concessions varie d’une marque à l’autre. Certaines marques les soutiennent et les considèrent comme une partie intégrante de leur stratégie de mise en marché, d’autres, pas vraiment. Ce qui est dit publiquement sur le rôle des concessions diffère souvent de l’attitude interne de certaines marques.
Très peu de décisions importantes sont prises ici, au Canada. Les distributeurs d’automobiles canadiens sont redevables à leur société-mère. Bien sûr, les distributeurs canadiens peuvent modifier quelque peu les instructions de la société-mère, mais, dans l’ensemble, les décisions importantes qui touchent l’orientation de la marque ne sont pas prises au Canada. Cela crée souvent des tensions dans la relation franchiseur/franchisé. Dans de nombreux cas, les plans élaborés à l’extérieur du Canada ne s’intègrent pas parfaitement aux marchés canadiens locaux.
Les années 2024 et 2025 s’annoncent comme des années difficiles pour le secteur de l’automobile. Et ça durera peut-être même plus longtemps. Alors que l’offre de véhicules revient à des niveaux normaux pour la plupart des marques, certaines vieilles mauvaises habitudes reviennent sur le marché.
Après plus de deux ans d’absence, les financements subventionnés et les remises sur les prix font leur retour sur le marché. Ce n’est pas le cas pour toutes les marques.
Les consommateurs de toutes marques sont toutefois encore une fois perplexes quant aux marges bénéficiaires et aux prix, en général. Ils interprètent ces remises comme des prix artificiellement élevés.
Cette pratique exerce une pression sur les prix de toutes les marques et nuit potentiellement à la satisfaction et à la confiance des clients. De plus, à mesure que les stocks augmentent, les pressions à la baisse sur les prix s’ensuivent. Dans le même temps, la hausse des taux d’intérêt a augmenté le coût des inventaires. Un calcul simple montre que les bénéfices des concessions seront affectés.
L’économie ne rebondit pas comme tout le monde l’espérait. Les consommateurs ressentent toujours les effets de la hausse des prix en attendant que les salaires augmentent. Le renouvellement des prêts hypothécaires coûte cher à certains propriétaires car l’augmentation est considérable de leurs mensualités.
Le coût d’acquisition d’un véhicule incite de nombreux consommateurs à retarder le remplacement de leur véhicule. Bien sûr, les conducteurs qui ont besoin d’un véhicule pour des raisons professionnelles ou familiales ou qui doivent renouveler leur bail sont toujours sur le marché, mais beaucoup d’autres laissent tomber et reportent leur décision d’acheter.
J’ai mené des recherches intéressantes sur la population et les ventes de véhicules neufs. Sur un horizon de vingt ans, les immatriculations de véhicules neufs n’ont pas suivi le rythme de la croissance démographique.
En 2004, la population du Canada était de 31,94 millions de personnes. En 2024, la population canadienne aura augmenté à 40,01 millions de personnes, soit une augmentation de 25,26 % sur 20 ans. Pour ce qui est des ventes de véhicules légers neufs, en 2004, elles atteignaient 1,534 million de véhicules légers neufs. En 2023, le nombre de véhicules légers vendus au Canada était de 1,664 million, soit une augmentation de 8,47 % sur 20 ans.
Pouvons-nous dire que la différence est due à une demande refoulée ? Si les ventes de véhicules légers neufs correspondaient à cette augmentation en %, en 2024, elles s’élèveraient à environ 2 millions de véhicules.
Le dernier SAAR établi par DesRosiers Automotive Consultants en juillet 2024 était de 1,77 million de véhicules. Les ventes de véhicules neufs au Canada ont culminé en 2017 à 2,04 millions. Certes, les dernières années ont permis d’augmenter le volume. De mon point de vue, l’avenir semble plus prometteur, car la demande refoulée devrait diminuer tout au long de 2025.
Cet été, tous les regards se sont tournés vers la Réserve fédérale américaine. Les spéculations vont bon train quant au calendrier et à l’ampleur des baisses potentielles des taux d’intérêt aux Etats-Unis.
« Malgré les incertitudes persistantes, les marques continuent d’exiger que les concessionnaires investissent davantage dans leurs concessions. »
Au Canada, la Banque centrale a déjà commencé à réduire les taux d’intérêt. À l’heure actuelle, on s’inquiète du côté du travail, tant en ce qui concerne le nombre de travailleurs que les salaires et leur impact sur l’inflation. Cela dit, le taux moyen prévu du financement à un jour de la Banque du Canada, actuellement à 4,4 %, devrait baisser à 3 % d’ici la fin de 2025. C’est une bonne nouvelle.
La transition vers l’électrification des véhicules bouleverse les perspectives. Les gouvernements poursuivent leurs projets, mais les consommateurs et certaines marques du secteur de l’automobile envoient des messages contradictoires.
Les consommateurs ne se bousculent pas pour acheter des véhicules électriques aux prix que les marques en demandent pour être rentables. Par conséquent, certaines marques ont retardé leurs projets de conversion jusqu’à ce que la demande des consommateurs augmente. Il existe également une possibilité très réelle que des véhicules chinois entrent au Canada, ce qui diviserait encore davantage la part de marché.
Malgré les incertitudes persistantes, les marques continuent d’exiger que les concessionnaires investissent davantage dans leurs concessions. Certains concessionnaires se demandent bien pourquoi.
Il y a quelques mois, j’ai écrit un article intitulé Restez en vie jusqu’en 2025. Alors que nous terminons 2024 et que nous approchons de 2025, il existe quelques points positifs qui favorisent l’optimisme.
Il reste cependant quelques nuages noirs à surveiller. Les défis sont encore nombreux, ce qui signifie que les concessionnaires doivent rester vigilants dans leur planification de 2025.