Les associations de concessionnaires aident leurs membres à trouver des techniciens qualifiés à l’étranger
Au cours des prochaines années, entre 2024 et 2031, les offres d’emploi pour les techniciens d’entretien automobile, les mécaniciens de camions et d’autobus et les réparateurs de mécaniques devraient atteindre 54 000. Le nombre de demandeurs d’emploi devrait se situer aux environs de 44 800.
C’est ce que révèle le Système de projection des professions au Canada (SPPC) du gouvernement fédéral. Il montre que les possibilités d’emplois découlant de l’expansion et de la demande de remplacement dépassent de 9 200 le nombre de demandeurs d’emploi provenant des jeunes qui quittent l’école, de l’immigration et de la mobilité.
« Il y a de moins en moins de jeunes qui s’inscrivent aux écoles de mécanique automobile », a déclaré Ian P. Sam Yue Chi, président-directeur général de la Corporation des concessionnaires d’automobiles du Québec (CCAQ) dans le cadre d’une entrevue avec Affaires automobiles. « J’inclurais aussi tous les métiers de la carrosserie dans lesquels nos concessionnaires sont impliqués. »
Cela signifie qu’à mesure qu’une génération de techniciens de service approchera de la retraite et quittera le travail au cours des prochaines années, et qu’une jeune génération de travailleurs potentiels s’éloignera des métiers, les concessionnaires auront de plus en plus de mal à remplacer leurs techniciens.
Le problème n’est pas nouveau; la CCAQ a anticipé ce déséquilibre il y a des années et a mis sur pied une agence interne de recrutement international qui contribue à atténuer le problème. Elle possède un permis sous la bannière Mobilö pour la gestion des talents en immigration et collabore souvent avec d’autres provinces canadiennes. L’initiative remonte à sept ans.
Les concessionnaires de véhicules automobiles de l’Ontario (CVAO) ont également mis en place un programme. Sam Yue Chi a déclaré que Todd Bourgon, PDG et directeur général de la CVAO, a été le premier à lever la main pour voir comment les choses fonctionnaient lorsque la CCAQ a mis en œuvre son initiative de recrutement. À l’époque, M. Bourgon envisageait la possibilité de créer un programme similaire pour les concessionnaires de l’Ontario.
« Todd Bourgon nous a accompagnés et il a très vite compris comment les choses fonctionnaient », a déclaré Sam Yue Chi. « À titre d’entreprise, nous ciblons évidemment en priorité les zones d’emploi francophones. C’est pourquoi nous nous rendons le plus souvent en Afrique du Nord. » (L’Algérie et le Mexique, pour diversifier un peu, font également partie des autres régions visées.)
M. Bourgon a déclaré que l’Ontario fait actuellement face à une pénurie importante de techniciens. Au 1er trimestre de 2023, il y avait plus de 3 000 postes vacants dans les métiers de l’automobile dans la province, selon un rapport du MNP commandé l’an dernier par le CVAO. Avant la pandémie, on en comptait environ 1 500.
Le rapport MNP a été créé pour aider le CVAO à mieux comprendre ce à quoi ressemblera la prochaine décennie en termes de techniciens. Il a pris en compte les ventes de voitures, l’immigration, la croissance démographique et la tendance actuelle en matière d’éducation – les diplômés sortants (ou non) du système scolaire. Il a également souligné le recours au Programme des travailleurs étrangers temporaires pour combler les postes vacants.
« Il y a un retard énorme, et ce, depuis très longtemps. La seule façon de corriger les effets de ce retard consiste à augmenter le recrutement de techniciens étrangers, comme nous l’avons fait, ou de combiner cela avec une revitalisation du système scolaire, avec des jeunes qui voient notre métier comme une carrière viable », a déclaré Todd Bourgon.
Il a déclaré que le programme de recrutement de techniciens étrangers avait été lancé juste avant la pandémie. À l’ouverture des frontières, le CVAO avait déjà reçu un certain nombre de demandes de membres pour les aider à trouver des techniciens certifiés à l’étranger. Ils se sont rendus aux Philippines parce que le système d’éducation (apprentissage scolaire, métiers et certifications) semblait correspondre aux normes de l’Ontario. L’anglais est également l’une des langues officielles du pays (l’autre étant le philippin).
Faire venir un travailleur étranger peut prendre environ un an, parfois plus, mais le programme semble être une réussite, et les concessionnaires semblent en général satisfaits. Brent Ravelle, président du groupe des sociétés Ravelle, en Ontario, en est un exemple.
« Mes gars sont parmi les premiers à arriver en Ontario. J’en ai quatre : deux dans chaque concession. Ils viennent des Philippines, ce sont des gens de métier hautement qualifiés et ce sont de véritables techniciens. Ils exercent tous cette profession depuis 13 ans », a déclaré M. Ravelle.
« La formation qu’ils reçoivent aux Philippines est complète, y compris la formation des constructeurs d’automobiles, qui est très similaire à la nôtre », a-t-il ajouté. « Et comme c’est le cas pour la plupart des constructeurs d’automobiles, la formation en matière de véhicule électrique n’est devenue un facteur important que depuis un an environ. Mes gars sont ici depuis 18 mois, alors ils ont commencé à se concentrer sur cette formation avec moi. »
« On ne peut pas dire du jour au lendemain qu’on embauchera 5 000 techniciens. Il a fallu commencer il y a des années et former des apprentis »
— Brent Ravelle, président du groupe des sociétés Ravelle
Cependant, M. Ravelle a également souligné que le programme de travailleurs étrangers est une solution provisoire pour les concessionnaires. « C’est une façon pour nous de répondre à l’appel des consommateurs qui ont besoin qu’on fasse l’entretien de leur véhicule, pendant que nous réfléchissons à la façon d’attirer plus de gens dans ce secteur. »
Selon le rapport MNP, le nombre d’offres d’emplois dans le secteur de l’automobile devrait atteindre 6 000 en 2025, tandis que le nombre de demandeurs d’emploi dans ce secteur devrait atteindre 5 100. En 2030, le nombre d’offres d’emplois s’élèvera à 5 200 et correspondra à celui des demandeurs d’emploi.
« On ne peut pas dire du jour au lendemain qu’on embauchera 5 000 techniciens. Il a fallu commencer il y a des années et former des apprentis », a déclaré M. Ravelle qui est un grand partisan de la collaboration avec les écoles secondaires locales pour parler des métiers.
En matière d’éducation, la CCAQ a lancé une campagne publique intitulée « Ma carrière en concession », lancée le 7 juin dernier lors du Grand Prix de Montréal. Selon Sam Yue Chi, la campagne amène les gens sur un site web où ils peuvent entrer en contact direct avec les concessionnaires membres pour engager la discussion.
« Nous partons du principe que le concessionnaire aura actuellement ou certainement des postes à combler demain », ce qui peut ainsi contribuer à remplir une banque d’employeurs qui peuvent potentiellement travailler avec la CCAQ de façon continue et proactive.
Du côté des candidats, plutôt que de s’enliser dans la préparation d’un CV et d’une lettre d’intention, les chercheurs d’emploi peuvent se rendre directement sur le site macarrierelconcessionnaire.com. Ici, les concessionnaires peuvent en apprendre davantage sur le candidat grâce à ses réponses aux 5 questions.
« Le site web génère 5 questions qui permettent de qualifier l’individu pour certains types d’emplois, et l’individu a le choix d’entrer en contact avec un certain nombre de concessionnaires de son choix – dans une région de son choix », a déclaré Sam Yue Chi. « Après cela, nous appelons cela un appariement ; c’est vraiment basé sur le même principe que Tinder. »
L’objectif de la campagne consiste à présenter au grand public la diversité des rôles et des postes disponibles dans les concessions, en sensibilisant les candidats à la possibilité de profiter d’une longue et riche carrière dans l’industrie.
« De notre point de vue, le recrutement international peut répondre à un besoin, mais il ne peut pas répondre à tous les besoins », a déclaré Sam Yue Chi. « Nous souhaitons ardemment être en mesure de promouvoir suffisamment les métiers techniques pour que ça devienne un incontournable auprès des jeunes. »
