Plusieurs d’entre vous ont sûrement lu comme moi sur LinkedIn l’article « Nike, victime du ROIsme : l’histoire d’un suicide digital », un article fort intéressant qui raconte le suicide digital de la marque. Comment Nike a sacrifié son âme sur l’autel du ROI (Return on Investment). Comment la data a tué la magie. Et pourquoi ce qui est arrivé à Nike devrait terrifier toutes les marques qui confondent performance et croissance.
Je suis dans le monde de la publicité depuis 1989. Oui, j’étais bien jeune ! Ces années-là, on vendait des produits, des marques, de la performance, de l’émotion… On ne mesurait sûrement pas assez. Aujourd’hui, dans un monde dominé par les tableaux Excel, les KPI et la culture du résultat immédiat, le ROI (Return on Investment) est devenu le critère de mesure de toute décision d’affaires. Les dirigeants, les investisseurs et parfois même les employés en viennent à ne juger la valeur d’un projet qu’à travers sa rentabilité mesurable à court terme. Mais cette obsession pour le ROI cache un danger insidieux : celui de sacrifier la vision, l’innovation et la croissance durable au profit du gain immédiat. Nike n’est pas un cas isolé, mais le symptôme le plus spectaculaire d’une épidémie qui ravage le marketing moderne, car aujourd’hui, on remplace le pourquoi par le combien. On confond dashboard et vision.
L’arrogance du ROIsme, c’est de croire que la data remplace la relation humaine. Qu’un algorithme vaut un vendeur passionné. Les symptômes du ROIsme dans votre entreprise sont faciles à identifier. Vous demandez le ROI d’une campagne de marque. Vous coupez l’innovation « non mesurable ». Vous préférez 1000 clics à une émotion. Vous optimisez le tunnel plus que le produit. Vous parlez de « posséder » le client.
Je crois que les grandes marques du 21e siècle seront celles qui sauront marier la data et la magie, la performance et l’émotion, la mesure et la démesure. Celles qui comprendront qu’aucun algorithme ne pourra jamais créer ce qu’une histoire authentique peut faire naître.
Nous pouvons transposer l’histoire de Nike à toutes les marques, à toutes les industries tout comme aux grandes marques de l’automobile. L’automobile est un secteur où la vision à long terme est vitale.
Dans l’automobile, le ROI est devenu roi. On privilégie les VUS à forte marge, on optimise le trimestre et on retarde les investissements lourds dans l’électrique. Résultat : on maximise le présent… en hypothéquant l’avenir.
En réduisant la stratégie à une logique comptable, on en oublie que la création de valeur repose aussi sur des dimensions qualitatives et intangibles.
Il faut savoir marier data et magie !
