Il y a près de 100 ans, Walter Chrysler a déclenché une révolution au chapitre du freinage des automobiles en équipant de série la nouvelle voiture portant son nom de freins hydrauliques aux quatre roues – une caractéristique qui allait devenir omniprésente dans toute l’industrie et survivre à ce jour avec peu de changements.
Cette technologie est peut-être sur le point de changer, cependant.
La Chrysler de 1924 n’était pas la première voiture de série équipée de freins hydrauliques. Cette distinction appartient à la Duesenberg de 1921, un véhicule haut de gamme et à faible volume qui utilisait un système hydraulique problématique conçu par un certain Malcolm Lougheed.
Ce sont les ingénieurs de Chrysler, cependant, qui ont développé ce système pour la production, enregistrant plusieurs brevets au passage. En échange des droits d’utilisation, Chrysler a cédé les brevets à Lougheed qui a procédé à l’accréditation de la technologie pour le reste de l’industrie par l’entremise de sa société – Lockheed !
Comme le nom Lockheed, qui est devenu synonyme de freins lors des premiers balbutiements de l’industrie de l’automobile, le nom Brembo jouit aujourd’hui d’une association similaire, ayant établi sa réputation sur les circuits du monde, y compris sur les voitures de Formule 1. Les freins Brembo figurent désormais comme une caractéristique sine qua non sur une multitude de véhicules différents de hautes performances.
Au-delà de ses applications en course et de hautes performances, Brembo est également un fournisseur majeur de composants de frein pour plus de véhicules grand public, et c’est ce marché plus large qui est au centre de ses dernières innovations en matière de freinage, collectivement étiquetées Sensify (une combinaison des mots « sens » et « simplify »).
« Sensify vous fait passer d’un système qui, pendant des décennies, a appliqué la même pression de freinage sur les 4 roues en même temps, à un système qui peut gérer séparément les forces de freinage sur chaque roue, en fonction des besoins du conducteur, de la dynamique du véhicule et des conditions routières. »
L’ABS (Anti-lock Brake System) ne fait-il pas déjà cela, me direz-vous ? C’est le cas, dans une certaine mesure. L’ABS permet efficacement une série de blocages et de dégagements rapides pour maintenir la rotation du pneu à la limite de l’adhérence.
Sensify va encore plus loin en utilisant un logiciel prédictif et l’intelligence artificielle (IA) pour contrôler chaque frein séparément et encore plus précisément ; ce système maintient le pneu au seuil du blocage plutôt que de se verrouiller et de le relâcher.
Le résultat est un arrêt plus en douceur et mieux contrôlé qui offre le même contrôle de la direction au freinage que l’ABS, mais sans les pulsations dans la pédale de frein ni le bruit qui peuvent devenir déstabilisants pour les conducteurs surpris par l’événement.
Sensify propose beaucoup plus cependant. À la base, on trouve ce qu’on appelle la technologie du « freinage électrique ». Plutôt que d’appliquer une pression directement sur un cylindre hydraulique, comme c’est la norme, le frein électrique utilise la pédale de frein comme un interrupteur électronique variable, contrôlant le signal envoyé à un moteur électrique qui, à son tour, applique une pression sur le cylindre hydraulique.
Ce n’est pas un concept nouveau. Il a longtemps été utilisé dans les avions. La Toyota Prius a été la première voiture à l’utiliser, et divers modèles Lexus, Mercedes-Benz et Alfa Romeo, ainsi que la Corvette C8 de Chevrolet l’utilisent également. Sensify va encore plus loin en envoyant des signaux électroniques non pas à un vérin hydraulique central, mais à des cylindres individuels à chaque roue.
Alternativement, Brembo propose également des variantes Sensify avec des moteurs électriques plutôt que des vérins hydrauliques, pour serrer les étriers à chaque roue.
Il est important de noter que le système Sensify utilise également un nouveau design de ressorts qui permet de retirer complètement les plaquettes du rotor quand elles ne sont pas utilisées. Cela élimine efficacement la résistance au roulement due à la traînée des freins, ce qui contribue à réduire la consommation de carburant des véhicules à combustion interne et à augmenter l’autonomie des véhicules électriques.
Brembo a équipé une Tesla Model 3 de freins hydrauliques Sensify sur les roues avant et des étriers électromécaniques à l’arrière pour un événement médiatique qui s’est tenu récemment sur le terrain d’essai nord-américain de Michelin, à Laurens, en Caroline du Sud. Les tests de comparaison avec une Tesla de production similaire, freinant dans une variété de circonstances différentes sur des surfaces humides et sèches, ont valu de nombreux éloges au système Sensify, et ça change la donne !
Est-ce possible ? Tout à fait. La perspective d’éliminer des mètres de tubes hydrauliques dans tout le véhicule pourrait, à elle seule, rendre ce système très attrayant pour les constructeurs d’automobiles. La possibilité d’adapter électroniquement les performances de freinage ainsi que la sensation dans la pédale en fonction de différentes circonstances et de différents clients devrait également être une attraction.
Les inconvénients ? Très peu. Le coût est toujours un facteur, mais il est inconnu pour le moment. Les moteurs-roues pour le système électromécanique ajouteront un poids non suspendu, ce qui peut affecter la conduite et la maniabilité.
Quand verrons-nous ce système ? Brembo dit que Sensify est prévu pour la production en 2024, mais on ne sait pas encore qui sera le premier à l’adopter.
