L’une des tendances en matière de marketing numérique les plus marquantes qui remodèlent actuellement le commerce de détail d’automobiles au Québec, et qui devraient faire de même au Canada, est la réglementation sur la façon de collecter et de gérer les renseignements personnels des consommateurs.
Anciennement connue sous l’appellation projet de loi 64, la loi a été adoptée par l’Assemblée nationale du Québec en septembre 2021. La mise en œuvre de plusieurs mises à jour importantes a eu lieu environ un an plus tard, ce qui a contribué à renforcer la protection de la vie privée des consommateurs du Québec et imposé des responsabilités aux entreprises qui font la collecte et la gestion des renseignements personnels.
« Ainsi, aujourd’hui, un concessionnaire perd certaines capacités de suivi dont il disposait auparavant pour pouvoir mener une initiative marketing très ciblée. »
— Louis-Yves Cloutier, PDG et président de 360.Agency
« La loi réglemente essentiellement la manière dont les entreprises, les concessionnaires et toutes les industries gèrent les renseignements personnels des consommateurs », a déclaré Louis-Yves Cloutier, PDG et président de 360.Agency. « Cela change la façon pour les concessionnaires de faire leur marketing numérique. »
Il a déclaré que ce qu’apporte ce type de réglementation est le fait que les consommateurs ont désormais la possibilité de donner leur consentement sur la manière dont les entreprises — y compris les concessionnaires — les suivent. Ainsi, les entreprises du Québec (et celles qui font des affaires au Québec) doivent désormais disposer d’une plateforme de gestion du consentement sur leur site web.
« Une plateforme de gestion du consentement permet à un client de décider s’il souhaite faire l’objet d’un suivi ou pas sur les différentes plateformes de marketing numérique, comme Facebook, X, Google, etc. », a déclaré M. Cloutier. « Ainsi, aujourd’hui, un concessionnaire perd certaines capacités de suivi dont il disposait auparavant pour pouvoir mener une initiative marketing très ciblée. »
« Et ça va toucher le Canada », a ajouté Louis-Yves Cloutier. « Cela fait des années que ça se produit en Europe. »
Le Règlement général européen sur la protection des données (RGPD) est devenu applicable le 25 mai 2018 dans tous les États membres. Et en novembre 2020, la Californie a adopté la proposition 24, également connue sous l’appellation California Privacy Rights Act (CPRA), qui ajoute de nouvelles protections à la vie privée des consommateurs qui font écho au RGPD et qui ont probablement exercé une influence sur la loi au Québec.
Louis-Yves Cloutier a déclaré que les concessionnaires doivent désormais créer des stratégies de marketing capables de toucher davantage de personnes d’une manière moins ciblée ou d’utiliser leurs données de première main. Cela signifie s’assurer qu’ils font appel à une agence « qui peut également utiliser les données provenant du CRM, afin de suivre les consommateurs de manière ciblée ».
Cet ajustement a un effet à un point tel que Dominic Sigouin, président et chef de la Direction de Noahvik Consultants, décrit le virage marketing actuel comme quelque chose qui n’a pas encore été vu, ressenti ou, même, vécu par la plupart des Canadiens. Il entend par là les Canadiens qui n’ont pas subi les impacts d’un nouveau projet de loi qui sera adopté dans les années à venir.
« À titre d’exemple, quand ils visitent un site web, désormais les consommateurs ont la possibilité d’accepter ou de refuser les fichiers témoins ou, encore, de personnaliser leur choix », a déclaré M. Sigouin.
Quand les consommateurs refusent les fichiers témoins, les entreprises perdent le suivi des données. M. Sigouin a déclaré que les concessionnaires connaîtront probablement une baisse de 40 à 50 % du nombre de visiteurs du site web qui accepteraient habituellement le suivi ou n’auraient jamais eu le choix. En d’autres termes, au lieu d’avoir environ 10 000 visiteurs collectés et mesurés par Google Analytics, il y en aura probablement environ 5 000.
« Les concessionnaires connaîtront probablement une baisse de 40 à 50 % du nombre de visiteurs du site web qui accepteraient habituellement le suivi ou n’auraient jamais eu le choix. »
— Dominic Sigouin, Président et PDG de Noahvik Consultants
« Tout ce que nous suivons de même que la quantité d’information et de données que nous collectons évoluent considérablement », a déclaré M. Sigouin, ajoutant que tous ceux qui font du marketing, comme le reciblage, devront désormais changer leur façon de faire des affaires.
« Toutes ces fenêtres contextuelles de consentement aux fichiers témoins qu’on voit sur tous les sites au Québec — il n’y en a pas partout, et elles ne sont pas toutes bien installées et configurées selon les attentes de la loi », a déclaré Dominic Sigouin. « Au cours de la prochaine année, nous verrons ce déploiement, cette mise en œuvre. »
À ce stade, les concessionnaires commenceront à voir l’impact que ces changements auront sur leur stratégie de marketing et, peut-être, sur leur entreprise.
Au-delà du Québec, on observe une autre tendance : elle s’appelle plateforme de données clients.
« Je ne pense pas que vous puissiez probablement échapper à une conversation avec un spécialiste du marketing dans le secteur de l’automobile en ce moment sans entendre l’expression plateforme de données clients ou l’acronyme PDC », a déclaré Erin Richmond, directrice des Revenus chez sMedia (une société de logiciels basée à Régina, Saskatchewan).
Interrogée sur le PDC, Mme Richmond l’a décrit comme l’utilisation de vos données pour exploiter ou rendre votre marketing plus intelligent et améliorer votre expérience client. Quant à la différence ou à la comparaison avec la situation du Québec en matière de fichiers témoins et de suivi des sites web, Erin Richmond a déclaré que les données de première main utilisent le CRM au lieu de s’appuyer uniquement sur le suivi des sites web.
« Au lieu de placer un fichier témoin sur le site web d’une concession, vous pouvez prendre votre liste de clients, supprimer les caractéristiques identifiables ou les IP et les transmettre à vos plateformes publicitaires d’une manière conforme aux lois et aux réglementations en vigueur », a déclaré Erin Richmond.
Elle a déclaré que cette approche devrait être davantage adoptée.
Mme Richmond a également expliqué que les concessionnaires ont accès aux données depuis longtemps, mais que ces données étaient peut-être très cloisonnées. Elle ne pense pas que les spécialistes du marketing aient pris conscience du potentiel offert par une PDC ou des données de première main. « Cependant, nous avons la possibilité de supprimer ces silos et de réellement faire en sorte que les données clients d’une concession fonctionnent pour eux. »
« Au-delà du Québec, on observe une autre tendance : elle s’appelle plateforme de données clients. »
Cela signifie obtenir ces données non seulement pour fournir un meilleur service après-vente et un meilleur marketing pour les concessions, mais aussi les utiliser pour trouver de nouveaux clients. Pour Mme Richmond, tout partenaire dans le domaine du marketing numérique qui n’aide pas les concessionnaires à le faire en ce moment est « probablement un peu décalé ».
Elle a ajouté que les changements dans les réglementations et les lois qui ont un impact sur le marketing numérique ne sont pas nouveaux, et que les spécialistes du marketing se sont toujours adaptés à l’évolution de la technologie. « C’est plus intelligent et ça nous a aidé à faire mieux. »
Dans l’ensemble, Erin Richmond conclut que, si un concessionnaire travaille avec quelqu’un qui comprend la situation et qui lui donne la bonne information, « alors il est entre de bonnes mains ».
