La situation actuelle du marché du travail est-elle sur le point d’être politisée ?

Comme je l’ai mentionné au cours des derniers mois, il est maintenant assez évident que le Canada se dirige lentement vers la tenue d’élections fédérales dans un avenir rapproché.
Que ce soit au terme du mandat de ce gouvernement, ou plus tôt, le débat politique autour de ces élections imminentes s’intensifie rapidement. Les partis tentent de trouver un avantage stratégique dans les divers enjeux. Pour ce qui est des députés, ils se sont montrés extrêmement proactifs en rencontrant leurs électeurs au cours de l’été.
À l’approche d’une nouvelle session parlementaire, le contexte économique dans lequel évoluent les politiciens diffère légèrement de celui des 12 derniers mois.
Au printemps, il semblait que toutes les interactions à la Chambre des communes étaient structurées autour de la crise de l’accessibilité et de la hausse de l’inflation. Ces problèmes demeurent toujours majeurs pour notre pays, mais une tendance s’est manifestée au cours de l’été et pourrait devenir l’un des principaux sujets de division à Ottawa – et rapidement constituer un problème.
Économiquement parlant à l’échelle nationale, cet important thème économique est la santé du marché du travail canadien actuel.
Pendant un certain temps, les experts ont minimisé le risque d’une crise économique en affirmant que les Canadiens travaillaient et étaient bien payés. Depuis, on peut dire que le marché du travail s’est affaibli ; en effet, de nombreux employeurs importants, principalement du secteur privé, ont licencié des centaines de Canadiens.
Dans les faits, cette chronique m’a permis de clairement souligner la nécessité d’être plus nuancé et un peu plus rigoureux dans les discussions sur la pénurie de main-d’œuvre au Canada.
À titre d’exemple, une contraction économique ne résoudra peut-être pas directement le casse-tête complexe auquel les concessionnaires d’automobiles sont confrontés quand ils tentent de combler des postes clés dans leur entreprise. La population canadienne vieillit, et les vagues de licenciements ne signifient pas nécessairement que la main-d’œuvre formée et certifiée est redistribuée en fonction des besoins des entreprises.
« Les variations du marché du travail sont également difficiles à interpréter : en effet, le nombre d’emplois du secteur privé a diminué, tandis que le secteur public a embauché plus de 41 000 nouveaux employés le mois dernier. »
Alors que le taux de chômage est resté stable à 6,4 % en juillet — niveau le plus élevé depuis septembre 2021 —, il s’agit du deuxième mois consécutif au cours duquel le Canada enregistre une perte nette d’emplois.
Les variations du marché du travail sont également difficiles à interpréter : en effet, le nombre d’emplois du secteur privé a diminué, tandis que le secteur public a embauché plus de 41 000 nouveaux employés le mois dernier. De plus, le secteur du commerce de gros et de détail s’est révélé le pire de tous les secteurs pour le mois de juillet avec plus de 44 000 pertes d’emplois.
Les dirigeants de la Banque du Canada ont mentionné à quel point il peut être difficile de réduire les taux d’intérêt dans un contexte de ralentissement du marché du travail. Essentiellement, la réduction des taux d’intérêt devrait entraîner une légère augmentation de la consommation et contribuer à maintenir la croissance de notre économie, mais ce rebond pourrait être retardé ou atténué par les pertes d’emplois des Canadiens.
De plus, avec l’annonce récente de la banque centrale de réduire son taux directeur à 4,25 %, il semble évident que l’économie canadienne se trouve sur la corde raide, et qu’une réduction supplémentaire de l’inflation est nécessaire sans limiter simultanément la capacité de croissance.
L’une des variables économiques qui a poussé la Banque du Canada à faire preuve de prudence, ce qui était nécessaire, est la lente dégradation du marché du travail. Comme l’a mentionné le gouverneur de la Banque du Canada, Tiff Macklem, lors de sa conférence de presse après la baisse du taux directeur : « La faiblesse de l’inflation est un facteur qui entre en ligne de compte dans nos décisions quant au taux directeur… La piste est en vue, mais l’atterrissage en douceur n’a pas encore eu lieu. »
Le risque de désinflation est certainement un élément nouveau dans le portrait général de l’économie canadienne, et il faut s’attendre à ce que plusieurs chefs de parti s’y attaquent en le présentant d’une manière qui soit bénéfique pour leur parti. À l’approche d’une élection fédérale, il est plus que probable que les politiciens capitaliseront sur le fait que de plus en plus de Canadiens sont au chômage, et que ce phénomène est le symptôme d’une économie non dynamique dirigée par les libéraux.
Malheureusement, ces discussions sur l’économie pourraient aussi rapidement devenir un débat politique qui entraînerait des positions partisanes plus agressives à l’égard des nouveaux immigrants et des impacts des niveaux élevés d’immigration sur le marché de l’emploi et du logement au Canada.
C’est pourquoi il sera fascinant — et potentiellement frustrant — de suivre la façon avec laquelle les politiciens commencent lentement à s’engager sur la situation du marché du travail, car la nuance ne fait traditionnellement pas partie de l’approche utilisée à la Chambre des Communes.
Alors que certains secteurs pourraient bien traverser une phase majeure de licenciements et de réajustement financier, d’autres pourraient continuer à avoir un besoin urgent de travailleurs qualifiés et compétents.
Il y a probablement des concessionnaires d’automobiles qui ont dû prendre des décisions difficiles en matière de personnel tout en ayant besoin de nouveaux techniciens automobiles pour remplacer éventuellement les employés plus âgés.
Cette dynamique économique n’a pas été beaucoup évoquée ni couverte récemment, mais on peut s’attendre à ce qu’elle prenne de l’ampleur au cours des prochaines semaines, à mesure que de plus en plus de politiciens et de personnalités médiatiques commencent à en prendre conscience.
Espérons que le débat s’appuie sur les données économiques, les défis industriels et les différences sectorielles plutôt que de s’enliser dans quelques positions partisanes à courte vue.
Il est également fort possible que le processus électoral final mette en lumière des enjeux inattendus, sans rapport avec la santé et les perspectives économiques du Canada, laissant aux experts et à ceux qui ont des intérêts importants le soin de débattre des pénuries de main-d’œuvre, des visas de travail et des niveaux d’immigration, du vieillissement de la population et de la hausse du chômage.
Nous ne le souhaitons pas. Espérons que la capitale de notre pays accueillera une nouvelle session parlementaire passionnante.







