Rester au-dessus de la mêlée

Les associations doivent éviter de se laisser entraîner dans le chaos politique de la saison électorale à Ottawa

Le retour au Parlement a toujours été une période d’enthousiasme pour les personnes véritablement intéressées par le processus politique et également pour celles qui sont affectées par les résultats de ce même processus politique.

C’est une période souvent caractérisée par des surprises, des manœuvres d’intimidation et, pour être honnête, par un chaos total. Cette dynamique ne fait qu’empirer à l’approche des élections, alors que les partis deviennent de moins en moins collaboratifs et cherchent constamment de nouveaux angles d’attaque, légitimes ou non, pour souligner les méfaits des autres organisations politiques.

J’utilise habituellement ces chroniques pour écrire sur des questions politiques précises ou sur les tendances économiques dominantes, mais j’ai pensé que le climat politique actuel, où les votes de confiance s’accumulent à un rythme effarant, était l’occasion idéale de parler de l’approche générale que les parties prenantes devraient adopter quand elles traitent avec un Parlement divisé.

En effet, malgré ce désordre, les intervenants canadiens doivent encore utiliser à bon escient les quatre prochains mois d’actions politiques et trouver des moyens créatifs de faire avancer leurs dossiers auprès des principaux clés et représentants publics. Alors, comment le secteur de la vente au détail d’automobiles, qui est important sur le plan économique mais qui souffre souvent d’une opinion publique négative, peut-il réussir à une époque de partisanerie et de tensions politiques accrues ?

Eh bien, le secteur de la vente au détail d’automobiles est véritablement unique, et les acteurs qui y sont partie prenante ont une perspective différente de la plupart des principales voix souvent entendues au Parlement.

Comme il s’agit d’une industrie axée sur l’entrepreneuriat, le paysage diversifié de travailleurs et des liens importants avec le marché américain, les concessionnaires d’automobiles ont la capacité d’apporter leur propre histoire à la table et – croyez-moi – les histoires sont ce que les politiciens recherchent.

Il est désormais important de ne pas amplifier ou minimiser certaines tendances du secteur afin de s’assurer que le discours de l’association s’intègre dans la stratégie d’un parti, ce qui peut être attrayant quand les sondages pointent fortement vers un vainqueur majoritaire clair aux prochaines élections.

La clé consiste à identifier clairement et à exploiter de manière appropriée les fenêtres de possibilités où l’histoire des concessionnaires d’automobiles canadiens peut intervenir et apporter des idées, du contexte et une perspective à la discussion sur des questions importantes.

« Un bon exemple pour le secteur de l’automobile est le travail effectué par les représentants de l’industrie, au sein et autour du Parlement, pour tenter de mettre un terme à la récente crise du vol de véhicules.  »

Voyez les choses ainsi : une association pourrait très bien adopter la couleur politique qui lui semble la plus profitable. Si cette stratégie peut générer des gains à court terme, cette couleur ou cette réputation peut être difficile à perdre et entraîner des difficultés à long terme. Curieusement, l’association risque de se retrouver dans une situation difficile à long terme.

De toute évidence, il existe des liens historiques et régionaux qui peuvent créer des alignements entre les organisations politiques et les membres, mais le rôle des représentants des associations à Ottawa consiste à maintenir une position neutre, ouverte et collaborative.

L’autre option, durable et non partisane, consiste à tenter de teindre chaque enjeu pertinent de la couleur de l’industrie de l’automobile et, plus particulièrement, de la réalité des concessionnaires d’automobiles canadiens.

Chaque fois qu’il y a une consultation publique, un débat parlementaire ou une tendance médiatique proche des valeurs et des défis des concessionnaires d’automobiles, ils ont l’occasion de nuancer, d’ajouter des données et des faits concrets que seule cette industrie peut fournir.

À titre d’exemple, si une association, grande ou petite, estime que sa force réside dans les témoignages de ses membres sur la façon dont un changement de règles spécifiques peut affecter négativement leurs activités, il est alors essentiel de trouver des moyens de faire passer cette information aux politiciens, que ce soit en leur rendant visite à Ottawa ou en leur envoyant des coupures de presse pertinentes.

Cette approche nécessite non seulement un suivi constant et une communication continue avec les bureaux de politiciens qui occupent des postes stratégiques, mais elle oblige également l’association à définir clairement et, parfois, à améliorer, ce qu’elle peut apporter aux nombreux politiciens et fonctionnaires impliqués dans chaque cas spécifique.

Un bon exemple pour le secteur de l’automobile est le travail effectué par les représentants de l’industrie, au sein et autour du Parlement, pour tenter de mettre un terme à la récente crise du vol de véhicules.

Cette campagne aurait pu être interprétée comme s’il y avait eu dès le début un alignement clair avec l’Opposition officielle, et qu’il y avait un partenariat avec l’industrie de l’automobile et d’autres alliés pour générer de la pression sur le gouvernement.

L’objectif consistait à faire pression pour que le gouvernement agisse, car c’est l’objectif principal des parties prenantes en temps de crise. En réalité, les acteurs concernés de l’industrie de l’automobile ont interagi avec toutes les parties dès le début et se sont appuyés sur une approche factuelle pour présenter les meilleures pistes de solutions potentielles à cet important problème.

Les objectifs de ces discussions non partisanes étaient variés, certains d’entre eux visaient à inciter à l’action tandis que d’autres avaient une visée éducative, garantissant ainsi que les mesures prises étaient les bonnes.

En fait, la crise des véhicules volés n’a pas été initialement présentée sous une couleur politique spécifique, mais tous les partis qui ont décidé de prendre ce problème au sérieux ont été rapidement sensibilisés par les voix des experts et des intervenants de l’industrie de l’automobile impliqués dans le dossier.

« Pour se faire entendre à Ottawa, il faudra toujours être capable – et disposé – à parler à tout le monde et à établir un terrain d’entente. »

Une fois de plus, les groupes concernés ont présenté le problème sous leur propre angle et ont réuni plusieurs organisations à la table des négociations au lieu de laisser un seul parti mener la danse.

De toute évidence, certains partis d’opposition ont vu une occasion en or et se sont montrés plus collaboratifs dès le départ, tandis que le gouvernement avait besoin de la pression de l’industrie, des médias et de la Chambre pour s’aligner sur certaines des solutions recommandées par les experts du secteur. L’élément-clé est que les représentants du secteur de l’automobile n’ont pas penché vers un camp politique particulier, mais ont plutôt fait en sorte que chaque décideur important comprenne que les meilleures idées et perspectives, sur cette question spécifique, venaient de notre industrie.

En fin de compte, même si le chaos règne réellement à Ottawa, surtout à l’approche des élections, les intervenants n’ont aucune raison de se laisser emporter par cette frénésie.

Les jeux politiques auront inévitablement lieu, et il est essentiel que les parties prenantes restent concentrées sur leurs priorités, sur les histoires sous-jacentes qu’elles tentent de raconter, qu’elles restent créatives et qu’elles conservent une approche multiforme dans leur façon d’interagir avec les gouvernements.

Pour se faire entendre à Ottawa, il faudra toujours être capable – et disposé – à parler à tout le monde et à établir un terrain d’entente. Quand les groupes de défense des droits trouvent des moyens d’établir des liens plus profonds avec les politiciens, de nombreuses facettes ont tendance à disparaître… y compris la couleur de leur parti respectif.

À propos de Charles Bernard

Charles Bernard est économiste en chef à la Corporation des associations de détaillants d’automobiles (CADA). Vous pouvez le joindre à l’adresse suivante : cbernard@cada.ca

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