Qui peut acheter ou louer un véhicule ?

Qui peut acheter ou louer un véhicule ? La réponse qui doit venir en tête de la majorité des lecteurs est probablement : « N’importe qui », mais ce n’est toutefois pas le cas. Le présent texte vise donc à répondre à cette question toute simple à première vue et à clarifier certains concepts.

Sans grande surprise, l’âge de la majorité est fixé, au Québec, à 18 ans, et c’est à cet âge que la personne, jusque-là mineure, devient capable, si ce n’est quelques rares exceptions que nous aborderons plus loin, d’exercer pleinement l’ensemble de ses droits civils.

Le Code civil du Québec énonce notamment qu’une personne mineure peut contracter pour satisfaire ses besoins ordinaires et usuels. Dans le domaine de la vente d’automobiles, on se pose fréquemment la question à savoir si un mineur peut acheter ou louer seul un véhicule. Cela peut-il constituer un besoin usuel ? Malheureusement, il s’agit d’une notion qui n’est pas définie par la Loi, ce qui signifie que chaque cas est un cas d’espèce. Il faut donc analyser concrètement les circonstances entourant le contrat envisagé afin de déterminer s’il peut être considéré comme étant un besoin ordinaire ou usuel pour la personne mineure désignée. 

Prenons le cas d’un jeune qui désire se procurer un véhicule neuf pour impressionner ses amis lors de ses déplacements, alors qu’il est encore aux études, sans emploi et sans source de revenu. Il est fort probable qu’un tribunal considère que l’achat ne remplit pas les critères de la Loi, et que, donc, le mineur n’a pas la capacité de conclure cette transaction. Au contraire, dans le cas d’un autre jeune qui travaille déjà à temps plein dans un emploi stable,  qui souhaite acheter une « minoune » pour se déplacer et pour se rendre à son lieu de travail, il est prévisible qu’un tribunal conclue qu’il peut exercer ce droit.

Ces deux conjonctures sont certes flagrantes et peu représentatives de la réalité qui, elle, comporte plusieurs nuances. Néanmoins, vous comprendrez qu’au final, tout est une question d’interprétation. Le risque, si la Loi ne permet pas à la personne mineure d’agir seule ou représentée, est qu’un tribunal déclare l’acte comme étant nul de nullité absolue. De façon tangible, cela signifie qu’un tribunal pourrait ordonner l’annulation de la vente ou de la location du véhicule. 

Cela étant, l’adage « mieux vaut prévenir que guérir » prend tout son sens, et c’est pourquoi nous considérons qu’une bonne pratique consiste à demander au mineur de se présenter accompagné d’au moins l’un des représentants de l’autorité parentale (ses parents) ou de son tuteur, le cas échéant, afin que ce dernier donne également son consentement à la conclusion de la transaction envisagée. De cette façon, le mineur ne contracte pas seul, et la question de savoir si l’achat ou la location du véhicule satisfait ses besoins ordinaires et usuels n’a pas à être posée, évitant ainsi d’éventuelles contestations.

Ensuite, nous avons précisé qu’une personne majeure peut exercer pleinement ses droits sans devoir procéder à l’analyse de ses besoins. Or, comme abordé brièvement en introduction, il existe certaines exceptions à ce principe, exceptions prévues par des dispositions expresses de la Loi qui ne concerne toutefois pas la capacité de conclure avec un concessionnaire. La capacité d’une personne majeure peut également être limitée ou encadrée par l’ouverture d’un régime de protection. Puisqu’elle peut survenir dans un contexte de relation contractuelle avec un concessionnaire, cette situation mérite d’être examinée plus amplement.

Ainsi, dans le but d’éviter une éventuelle contestation et de risquer de voir la transaction annulée par le tribunal, quand un mandataire se présente en concession et souhaite conclure la vente, l’achat ou la location d’un véhicule pour le compte de la personne majeure inapte qu’il représente, il importe d’effectuer certaines vérifications préalables. 

La concession doit en premier lieu exiger copie de l’ouverture du régime de protection. En effet, ce n’est pas parce qu’une personne est âgée ou malade qu’il faut assumer qu’elle est nécessairement inapte à exercer ses droits civils, et il est primordial de confirmer d’abord la présence d’un régime de protection ouvert. Ensuite, il faut identifier qui est le véritable mandataire, car il n’est pas possible de prétendre que ce soit automatiquement l’un de ses enfants ou son conjoint. Enfin, il est pertinent d’analyser les clauses du mandat afin de déterminer si le droit de conclure la transaction envisagée est octroyé au mandataire. Une fois de plus, il est possible que ce ne soit pas le cas.

Agir de la sorte ne garantira pas d’être à l’abri de tout dépôt d’un recours judiciaire, mais permettra certainement au concessionnaire de démontrer qu’il a agi comme l’aurait fait tout autre concessionnaire raisonnable dans les circonstances.

Pour conclure, vous aurez compris que la question lancée en introduction est plus complexe qu’elle ne le semblait. En cas de doute ou pour plus amples renseignements, nous vous invitons à communiquer avec l’un des 6 avocats de la CCAQ avant de conclure la transaction, de façon à obtenir l’assistance requise pour éviter les situations délicates.

À propos Julia Labrecque-Saliba

Me Julia Labrecque-Saliba est conseillère juridique à la CCAQ. On peut la joindre par courriel au jsaliba@ccaq.com

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