L’année s’achève, et nous pouvons affirmer d’emblée qu’elle aura été remplie de rebondissements. Notre industrie est en plein changement, et l’évolution des nouveaux modèles d’affaires des constructeurs se poursuit un peu partout sur la planète. Retour sur les faits saillants du secteur de l’automobile de la dernière année.
Depuis plusieurs années déjà, les constructeurs ont vu l’occasion d’adapter leurs modèles d’affaires en suivant l’exemple des leaders du commerce électronique : ils ont transformé leur processus de vente en tirant avantage de l’évolution des comportements d’achat. Certains constructeurs offrent ainsi un service de vente directe aux consommateurs, tandis que d’autres se tournent vers les modèles d’agences, les concessions devenant ainsi de simples intermédiaires pour livrer les véhicules.
Ce phénomène a été accéléré par la pandémie, la fermeture des commerces physiques obligeant plusieurs entreprises à trouver une alternative pour poursuivre leurs opérations en ligne, et les constructeurs y ont vu l’occasion de pouvoir s’impliquer davantage dans leur relation directe avec les consommateurs. C’est pourquoi les agences ont gagné en popularité, et ce, pas seulement dans des petits marchés tests. Par exemple, bien que la réalité du marché européen soit bien différente de celle de l’Amérique du Nord, plusieurs constructeurs ont récemment pris des initiatives pour changer le modèle d’affaires. Stellantis a envoyé un avis de non-renouvellement à l’ensemble de ses concessions européennes l’an dernier pour les transférer sur un modèle de distribution par agence d’ici 2024. Même chose pour BMW Europe.
« Notre industrie est en plein changement, et l’évolution des nouveaux modèles d’affaires des constructeurs se poursuit un peu partout sur la planète. »
L’arrivée massive des véhicules électriques sur nos routes joue également un rôle important dans les nouveaux modèles d’affaires. Au mois de septembre dernier, Jim Farley, président et chef de la Direction de Ford Amérique du Nord, annonçait à Las Vegas que l’entreprise diviserait la marque Ford en deux. Les concessionnaires désirant vendre des véhicules électriques dans le futur devront, entre autres, investir plus d’un million de dollars dans une infrastructure de recharge rapide à même leur concession afin d’augmenter le niveau de service à la clientèle. Jim Farley a aussi déclaré qu’il désirait que les concessionnaires vendent les différents modèles offerts à un prix prédéterminé et fixé par le constructeur afin d’évacuer l’un des points de pression dans l’expérience d’achat d’un véhicule, la négociation. Il semble que Ford, après différentes discussions avec ses conseils de concessions, ait fait le choix de continuer sur un modèle de franchise, mais adapté à une réalité qui vise enfin à garantir une expérience client complète avec un partage de risques d’affaires entre le constructeur et le concessionnaire, conformément aux principes mêmes des systèmes de franchises tels que nous les avons toujours connus. Lincoln et Cadillac semblent également vouloir aller dans le même sens, offrant même de racheter les concessions qui ne veulent pas investir dans la transition. Ces initiatives récentes nous démontrent clairement qu’entre le modèle complet de transfert de modèle d’affaires sous agence et le modèle de franchises tel que l’on connaît aujourd’hui, il y a différents entre-deux qui sont en train de se développer dans différents marchés dans le monde et sur lesquels les concessionnaires peuvent exercer une influence.
Dans tous les cas, l’élément-clé que nous nous devons de retenir et qui recoupe toutes les initiatives est que les constructeurs cherchent à créer une relation durable avec la clientèle. Les concessionnaires qui investiront dans cette relation seront sans aucun doute ceux qui survivront à cette période de changements. En effet, c’est en mettant l’expérience client au centre des stratégies organisationnelles, en misant sur l’implantation de bonnes pratiques commerciales et sur une équipe mobilisée et outillée pour incarner cette vision que les consommateurs et les constructeurs réaliseront pleinement la valeur ajoutée des concessionnaires dans l’expérience d’achat d’un véhicule.
J’aimerais vous laisser sur un dernier constat intéressant qui vise un marché où plus de 80 % des véhicules livrés sont électriques, la Norvège. Dans cette région où Tesla a des parts de marché qui s’approchent aujourd’hui de celles des constructeurs mondiaux à gros volume, elle a mis son énergie des dernières années à accroître considérablement sa présence physique dans toutes les régions de la Norvège afin de garantir une expérience d’achat et d’entretien adéquate à sa clientèle. Tesla s’est ainsi bâti un réseau de concessions et de centres de services de 25 adresses pour une population de 5,4 millions d’habitants. Par habitant, c’est l’équivalent du réseau Toyota en Amérique du Nord. Sachant que votre évaluation foncière collective dépasse les 3 milliards de dollars pour le Québec seulement, si vous étiez un constructeur qui possède déjà un réseau de concessions fort et présent dans toutes les régions en 2022, quelle décision prendriez-vous pour le développement de votre marque ?
